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L’épineuse question des métaux rares sur les questions environnementales et sociétales

Des roches aux couleurs vives et aux noms exotiques, les terres rares, se font désormais appeler l’or noir du XXIème siècle ! Avec une consommation qui s’est envolée, passant de zéro à cent en moins de deux décennies, ces galets brillants sont devenus l’objet de toutes les convoitises. Ça chauffe sur la scène géopolitique ! Pis encore, qui aurait cru que cette industrie à l’allure si innocente était un vrai cauchemar pour l’environnement ? Voilà le côté obscur de notre fameuse “transition verte”. Cachez cet écologisme que je ne saurais voir !

Grimace : Perdu au fin fond d’une mine d’extraction de ces précieuses terres rares dans la lointaine province du Jiangxi, en Chine. Tout ça, clic clac, immortalisé en octobre 2010. Photo de notre correspondant anonyme. Mention spéciale Reuters

Le mystérieux royaume des métaux exotiques

Imaginez un cocktail de minerais qui ne se mélange pas comme des petits pois dans une soupe mais qui préfère flirter entre eux, incognito, et se fondre en une potion magnétique – oui, c’est notre monde fascinant de métaux rares. Il regroupe une ribambelle de protagonistes, dont le discret Cobalt, le flamboyant Gallium, non pas un, non pas deux, mais 17 princes à la cape éclatante regroupés sous l’énigmatique nom de Terres Rares, le robuste Tungstène, le séduisant Graphite et l’intrigante Indium.

Et ce nom, “Terres Rares”, semble émerger d’un roman de science-fiction, n’est-ce pas ? L’histoire derrière c’est qu’il n’y a rien de plus tête de mule que ces gars pour se laisser isoler chimiquement. Pourquoi ? Parce qu’ils se ressemblent tous comme deux gouttes d’eau et mélanger leurs superpuissances est leurs passe-temps favori.

On distingue généralement les “Terres Légères” et les “Terres Lourdes”. Cette distinction ne repose pas sur le nombre de séances de gym qu’ils font par semaine mais est liée à la configuration de leurs électrons. Plus lourde est l’âme – je veux dire le numéro atomique Z – plus l’élément sera du type Terres Lourdes, un peu comme deux frères se disputant le rôle du costaud.

Et ces terres rares ne sont pas que belles à regarder, oh non ! Elles ont un tas de compétences différentes. Conductivité, magnétisme et propriétés optiques et catalytiques n’en sont que quelques-unes. C’est un peu comme si un super-héros et un scientifique génial avaient eu un bébé. Ces caractéristiques en font des incontournables dans de nombreux domaines, depuis l’optique jusqu’à l’industrie chimique et les produits manufacturés comme nos ordinateurs, smartphones, téléviseurs et tablettes préférés.

Vous en voulez plus ? Alors imaginez ceci : il faut jusqu’à une tonne de ces terres rares pour construire une éolienne. Maintenant, imaginez combien de voitures peuvent être faites avec cette quantité. Hé bien, ce serait entre 285 et 2000 voitures. Les voitures hybrides et électriques sont particulièrement gourmandes et se régalent avec ces terres rares, un peu comme des gosses dans un magasin de bonbons.

Alors, la prochaine fois que vous regardez votre smartphone ou votre voiture électrique, rappelez-vous de ces champions cachés qui rendent possible toute cette technologie que nous aimons tant.

L’échiquier géopolitique bouleversé

Règne incontesté au sommet de la production mondiale de terres rares, oui, c’est bel et bien l’Empire du Milieu qui porte la couronne. Un royaume quasi sans rival, bâti sur ce pétrole du 21ème siècle.

Plongeons ensemble dans le passé, l’année 1980 pour être précis. Au coeur de la Mongolie intérieure d’alors, la Chine dénicha le trésor tant convoité, les terres rares. L’énigmatique Deng Xiaoping, père des réformes économiques de l’époque, clame haut et fort : “Le Moyen-Orient a le pétrole, la Chine a les terres rares (1992)”. Et voilà, l’Empire du Dragon s’emparait du marché des terres rares.

Jetez un oeil à la stratégie chinoise, finement élaborée en trois actes. Premier acte : la Chine tire parti de sa main d’oeuvre à prix minime et de ses préoccupations sociales et environnementales réduites pour attraper à la volée le monopole des mines. Astucieux, non?

Deuxième acte : la fameuse stratégie de “remontée de filière”. L’idée? Centrer chez elle toutes les industries nécessitant ces précieux minerais, aimantant ainsi investisseurs du monde entier et leurs technologies innovantes.

Troisième et dernier acte : instaurer un système de quotas et mettre le nez dans la grosse marmite des taxes à l’exportation. Résultat ? Une chute vertigineuse des exportations de 100 000 tonnes en 2009 à 35 000 tonnes en 2010, soit une baisse de 65%. Outch! Cela a bien sûr fait flamber les prix des terres rares hors des frontières chinoises et a mis KO la concurrence. Astucieux, non? Petit hic, en 2015, l’imposition des quotas prit fin suite à la réclamation commune du Japon, des USA et de l’Union européenne devant l’Organisation Mondiale du Commerce.

Aujourd’hui, même si le monopole chinois a légèrement fléchi (88% de la production mondiale vient de Chine alors qu’elle ne détient que 47% des ressources connues, contre 96% il y a dix ans), la question reste : est-ce la fin du règne ?

Il semblerait que nombreux soient ceux qui souhaitent mettre fin à la dépendance chinoise, les EUA en tête, soulignant l’importance économique et stratégique ces minéraux. C’est une véritable danse des terres rares qui se profile.

Irisés d’espoirs et de rêves de richesse, l’Australie, bon nombre de pays africains, et surtout, la Corée du Nord, convoitée pour ses réserves potentielles astronomiques (estimées au double des réserves mondiales actuelles, soit 216 millions de tonnes). De quoi faire pâlir la Chine qui n’en possède “que” 55 millions ! Pas surprenant donc que des entreprises chinoises et sud-coréennes lorgnent vers le gouvernement nord-coréen.

Tandis que le Japon, crie sur tous les toits la découverte d’une fortune enfouie dans les profondeurs de l’Océan Pacifique : 16 millions de tonnes de terres rares. Incroyable, non? Imaginez, le sol marin pourrait receler jusqu’à 800 fois plus de terres rares que notre bonne vieille surface terrestre ! Avec la deuxième Zone Économique Exclusive (ZEE) du monde et le plus grand domaine sous-marin, la France est en pole position pour capter ce nouveau trésor. D’ailleurs, les enjeux des référendums d’indépendance de la Nouvelle-Calédonie en 2018, 2020 et 2022 sont d’autant plus stratégiques.

En somme, c’est une véritable course contre la montre, contre les prix et contre les quotas qui est engagée…

Quand la mère Nature plaide la cause des terres rares

Imaginez des paysages martiens, où les terres sont irrémédiablement ravagées par les vagues incessantes de l’extraction minière des terres rares, transperçant le sol comme un aiguillon empoisonné. Là, mes chers lecteurs, se déroule le raffinage, la seconde partie de ce sinistre ballet, qui chante une sinistre berceuse à la biodiversité environnante.

Jetons maintenant un œil – la prunelle bien dégagée de tout voile d’ignorance, s’il vous plaît – à notre voisine, la Chine. Ce n’est plus un secret pour personne que ce géant oriental a grandement contribué à l’alimentation du monde en terres rares. Pourtant, c’est bel et bien une épée de Damoclès qui pend désormais au-dessus de son propre territoire : pas moins de 60% des nappes phréatiques, 30% des rivières et 10% des terres arables portent les stigmates indélébiles de la pollution. Des zones si contaminées qu’elles lancent la funeste devinette “la pestilence ou la famine?” aux habitants.

On entend parler ici d’effroyables “villages cancer” ; ce n’est pas un simple mot, ce sont de véritables bourgs, où les habitants tombent comme des mouches, avec des taux de mortalité liée au cancer grimpant jusqu’à 70%. Je me permets ici de laisser la parole à Vivian Wu, la charismatique Responsable du développement à Frontier Rare Earth, une entreprise privée chinoise spécialisée en exploration et développement des terres rares en Afrique du Sud et au Mozambique. De son désarroi, émerge une éloquente citation : “Le peuple chinois a sacrifié son environnement pour nourrir la planète entière avec des terres rares. Le prix à payer pour développer notre industrie a été trop élevé, cela s’est fait au prix de la destruction de notre environnement.”

Se dresse alors une nouvelle carte géopolitique du raffinage des terres rares, où la Chine et d’autres pays externalisent leur pollution ailleurs avec finesse, la Malaisie servant souvent de cible.

C’est un peu comme si on déplaçait les chaises sur le pont du Titanic ; le bateau est toujours sur le point de couler, mais au moins, notre section est bien ordonnée, non?

Quand la quête des terres rares écorche le visage de Mère Nature

Mine de rien, notre bonne vieille Mère Nature a du mal à suivre le rythme. Nos gadgets technologiques préférés cachent un lourd secret: le prix exorbitant de leur production sur notre planète bleue. Et non, je n’évoque pas seulement votre empreinte carbone en scrollant Instagram. Non, il s’agit d’un souci plutôt “terre à terre”, et pour le dire clairement, c’est même carrément toxique: l’extraction des terres rares.

Imaginez des mares à ciel ouvert, d’où nous tirons ces précieux composants. Ça fait voler en éclats le sol et balance une pluie de particules fines et poussières toxiques en bonus. Sans blague, on parle de sept à huit tonnes de sulfate d’ammonium et d’1,2 à 1,5 tonne d’acide oxalique pour gratter une seule tonne d’oxyde de terres rares! De quoi vous filer la nausée, pas vrai? Si on écoute le vice-ministre de l’industrie et des technologies de l’information chinois, Su Bo, ces cocktails affreux restent dans la nature bien après notre passage, polluant même l’eau souterraine. Épouvantable, c’est le mot.

Et tiens, encore un petit mot pour ceux qui adorent creuser. L’extraction d’une tonne de terres rares fait vomir 1 300 à 1 600 m3 de déchets d’excavation, directement recrachés dans la nature. Une fois le sol défiguré par nos boues de déchets, ces charmants petits cocktails chimiques s’amusent à se répandre à loisir dans l’environnement.

Un autre truc que l’on oublie souvent, ce sont les jolies petites surprises radioactives offertes par nos précieuses terres rares. Oui, vous avez bien entendu, des métaux radioactifs tels que le radium, le thorium et même l’uranium font partie de la fiesta. Et la radioactivité qui se dégage n’est pas pour les timides. On parle d’une explosion de cas de cancers, de malformations chez les enfants nés à proximité de ce type de mines, et même d’une radioactivité qui grimpe jusqu’à 32 fois la normale autour de certaines mines, comme celle de Baotou en Chine! Pas étonnant que Mère Nature ne soit pas au top de sa forme, n’est-ce pas?

Autre dégât collatéral: l’activité minière signe l’arrêt de mort de nos forêts et éradique la couche de terre végétale. Ajoutez à cela l’érosion des sols 50 fois supérieure à la normale autour des zones de stockage des déchets, et vous obtenez un risque accru d’éboulement et de glissement de terrain. Le réchauffement climatique n’aidant pas, depuis les années 2000, on a enregistré au moins 25 ruptures de digues minières partout dans notre cher petit globe.

Et ne me lancez même pas sur la pollution visuelle et sonore causée par l’industrie minière. On finit par oublier à quel point cela impacte notre biodiversité, un autre coup dur pour notre chère petite planète.

Le coût environnemental de notre consommation technologique est plus élevé qu’on le pense à cause de l’extraction des terres rares. Des tonnes de produits chimiques sont utilisées, polluant l’eau souterraine, et l’érosion des sols est 50 fois supérieure à la normale autour des zones de stockage des déchets. Sans oublier les risques sanitaires liés à la radioactivité et les impacts sur la biodiversité dû à la pollution sonore et visuelle de l’industrie minière. Il faut faire quelque chose, bon sang!

Quand la raffinerie de terres rares s’invite au bal de la pollution

Les terres rares, ces divas de la chimie, ne se rendent jamais seules à la soirée. Non, elles s’accrochent les unes aux autres dans une symbiose intime. Du coup, les séparer revient à un véritable casse-tête scientifique, nécessitant des procédures de séparation aussi précises qu’une horloge suisse et aussi énergivores qu’un paquebot. Et quand on parle d’industrie, l’appel du très haut niveau de pureté est comme une douce sirène, intimant de revenir encore et encore. Pour répondre à cette attente, on mène une véritable guérilla chimique contre le minerai, avec comme armes de choix l’acide chlorhydrique, l’acide sulfurique, voire même l’acide nitrique.

En Chine, certaines régions minières semblent assiégées par cette guerre pour les terres rares, des rivières y portent les stigmates d’un cancer environnemental avec une concentration de métaux lourds qui bat des records, atteignant une concentration 100 fois supérieure aux normes nationales. Peu importe où le vent souffle, cette pollution chimique laisse une empreinte indélébile. A Pékin par exemple, les concentrations atmosphériques d’éléments de terres rares font se pâlir les villes européennes avec des chiffres 30 à 40 fois supérieurs à ces dernières.

Le chemin vers les énergies du futur, ces fameuses énergies renouvelables, semble donc semé d’embûches, démontrant avec éloquence la complexité du défi. Comme le soulignait sagement le prix Nobel de la Paix, Denis Mukwege, de la République Démocratique du Congo (dont le sol regorge de 60% du cobalt mondial) : « En conduisant votre voiture électrique [ou votre trottinette électrique], en utilisant votre smartphone, en admirant vos bijoux, prenez le temps de méditer sur le coût humain de la fabrication de ces objets ». Il est temps de rajouter aussi le coût environnemental à cette introspection.

Pourtant, qui pourrait nier l’importance de laisser derrière nous l’ère des énergies fossiles et d’atténuer notre trace carbone? Mais le ticket d’entrée pour un futur énergétique plus propre ne peut se limiter à une quête effrénée d’un nouveau mode de production énergétique. Non, il réside plutôt dans l’humilité de notre consommation quotidienne.

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Marc
Marc

Marc, rédacteur spécialisé dans la décoration intérieure, le bricolage et le jardinage. Sa passion et son expertise dans ces domaines lui permettent d’offrir des conseils pratiques et des idées inspirantes à ses lecteurs. Marc allie habilement connaissances techniques et créativité pour fournir un contenu de qualité, riche en astuces concrètes, visant à aider ses lecteurs à concrétiser leurs projets avec succès.

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