Ce n’est ni un coup de cœur ni un échec… Parfois, notre âme de spectateur a passé un moment délicieux en salle mais notre partie critique nous fait revenir à la réalité en remettant le film dans un contexte cinéphile. Cette sélection est donc composée d’un film qui offre de belles réflexions philosophiques en étant dénué de sentiments (Crimes of the future), à l’inverse d’un film bouleversant mais dans l’excès de pathos (Plus que jamais), et d’un dernier pour qui l’absurdité ne doit pas être une fin en soi (Fumer fait tousser). Retour sur les films qui laissent perplexes.
1. Crimes of the Future (Les crimes du futur) de David Cronenberg
En voilà un thriller dérangeant en sans chichi comme David les aime ! Outre le faux Dark Vador interprété par Viggo Mortensen et l’irritante Léa Seydoux, l’histoire nous présente une nouvelle perspective sur les fonctions du corps dans une société parallèle obscure où la douleur n’existe plus. Énigmatique et fascinant, le scénario est indéniablement riche en réflexions philosophiques : l’absence de douleur et le déplacement du plaisir, l’art, la chirurgie, l’esthétique et le spectacle du corps, à quoi pourrait ressembler une autre forme de sexualité, la réinvention de l’humain avec les nouvelles technologies et ses encadrements (comme avec le Bureau du Registre National des Organes géré par Kristen Stewart par exemple), et finalement jusqu’où nous pouvons dénaturer la nature. Un film de SF qui nous présente aussi de nouvelles espèces d’humains capables d’ingérer tout type de déchets ou encore de contrôler son organisme pour se créer des tumeurs, comme c’est le cas du personnage principal. Sauf qu’au-delà de cette histoire élaborée, que reste-t-il du film hormis des scènes ignobles d’incisions de corps et de suçage de ventres ouverts par une fermeture éclair ?… Aussi original et provoquant qu’il soit, je ne vois pas l’intérêt de faire un film pour proposer ces questionnements si ce n’est qu’une fascination perverse pour le corps déchiqueté (passion de l’horreur transmise à son fils cinéaste Brandon…). Enfin en ce qui concerne le titre, le film n’est pas crédible comme prenant place dans le futur, mais selon moi il aurait été plus judicieux de parler de monde parallèle. Car avec autant de technologies futuristes, pourquoi le réalisateur décide-t-il de laisser des fichus escaliers et autres inventions/objets démodés du quotidien ?
2. Plus que jamais de Emily Atef
Avant tout, je dois dire que j’ai évidemment été bouleversée par ce drame pour plusieurs raisons, voire peut-être un peu trop. Je m’explique. Comment ne pas être émue par une maladie ou un couple séparé, et surtout, le fait que ce soit l’avant-dernier film de Gaspard Ulliel avant Coma qui sort en novembre, ce qui donne une dimension solennelle inouïe ? On se sent forcément mal pour Hélène (brillamment jouée par Vicky Krieps) dont le destin se trouble à l’annonce d’une fibrose pulmonaire idiopathique et qui décide de voyager seule en Norvège pour réfléchir à son couple et à sa vie. On ne peut s’empêcher de se sentir oppressé lors des scènes où elle suffoque, comme si nous ressentions sa douleur par procuration… Mais ces thèmes-là ont déjà très bien été traités dans Nos étoiles contraires (2014) ou encore Avant toi (2016) qui abordait déjà le choix de la fin de vie, la culpabilité de ceux qui veulent préserver leur proche et la tentative d’un des deux amoureux de partir en voyage pour faire changer d’avis à l’autre. Qu’y a-t-il donc de réellement novateur dans ce (beau) film dramatique présenté dans la catégorie Un certain regard ?
Source : Paris Match
3. Fumer fait tousser de Quentin Dupieux
Il aurait presque été une déception si je n’étais pas une aussi grande fan d’humour absurde et de Dupieux. C’est donc bien parce que je t’aime que je t’accepte, Quentin. En comparaison avec ses précédents films, ce dernier plonge plus que jamais dans l’absurdité, ce qui en devient presque redondant et lassant ! En tout cas, il est bien mieux que son film précédent, Mandibules, pour lequel il ne s’était vraiment pas foulé sur le scénario. Cette fois, le gore se mélange ici à l’absurde et soit on y voit un génie, soit on déteste. Guidé par un humour lourd et beauf, le réalisateur ne cesse de titiller le spectateur sur le schéma : ça passe ou ça casse. Pour cette fois, ça passe… Le casting est au top (Adèle Exarchopoulos, Gilles Lellouche, Jean-Pascal Zadi, Vincent Lacoste, la voix d’Alain Chabat en chef « Didier » sûrement en clin d’œil à son film culte, Doria Tillier, Jérome Niel, le Palmashow…) malgré son incarnation parfois grotesque. Une grande dose de rire est donc bien au rendez-vous, accompagnée de cris de dégout, notamment lors d’une scène de broyage humain. Les réactions des gens dans la salle étaient vraiment hilarantes à ce sujet. On retrouvera d’abord Dupieux en salle le 15 juin avec Incroyable mais vrai avant de découvrir cette comédie.
Source : Télérama
Enfin, concluons par une petite note sur Coupez ! présenté en ouverture du festival qui n’est ni plus ni moins qu’un copier-coller du film original (ce qui m’a donné envie d’aller le voir). Les cinq diables, qui est une bonne idée mais pas transcendant car il s’agit de voyager dans des souvenirs grâce aux odeurs. Il y a l’idée de sorcellerie et de possession d’un enfant avec des pouvoirs qui rappellent un peu la série Strangers Things. Et enfin, Hi-Han (EO) de Jerzy Skolimowski, qui évoque la souffrance animale à travers l’errance presque introspective d’un âne, dans une ambiance psychédélique (belles couleurs, belle photographie). Mais ce trip hallucinogène traine un peu la patte… pour utiliser la métaphore animale !
Source : Télérama
Cynthia Zantout
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