Mardi à 14h30, une annonce sur les réseaux sociaux et dans les médias spécialisés a fait l’effet d’un séisme dans l’industrie du divertissement culturel. En effet, Microsoft a annoncé le rachat du studio de développement et d’édition de jeux vidéo Activision Blizzard pour une somme phénoménale.
Un projet qui prend de l’ampleur au fil du temps
Depuis quelques années, Microsoft s’impose comme un acteur culturel indispensable, notamment avec ses licences vidéoludiques telles que Halo, Sea of Thieves ou encore Gears of War. Mais depuis quelques années, avec l’arrivée du Xbox Game Pass en 2017 (un service qui propose un catalogue de plus de cent jeux pour un abonnement de 9,99 euros par mois), Microsoft cherche à agrandir le contenu de son offre. Bien que le géant américain soit leader sur ce système de jeux par abonnement, cela ne lui suffisait pas. De plus, Microsoft est en concurrence directe avec deux autres poids lourds du milieu : Sony (possesseur de God of War, Gran Turismo ou encore Uncharted) et Tensent. Ces deux concurrents ont des parts notables chez Ubisoft, Riot Games et Epic Games.
Le premier événement de masse pour Microsoft a été le rachat de Mojang pour 2,5 milliards de dollars, le studio derrière le jeu le plus joué de tous les temps : Minecraft. Ensuite vient le rachat en 2021 de Bethesda pour la somme de 7,5 milliards de dollars, une entreprise qui produit les jeux Elder Scrolls, Fallout et Wolfenstein. Mais Microsoft ne s’est pas arrêté là.
Un coup dit « à la Disney »
Après plusieurs rachats assez avantageux, Microsoft entame un partenariat avec EA afin de donner accès aux 60 jeux présents sur le catalogue EA Play. Ce dernier événement laisse croire que le géant américain en était à la fin de son processus de conquête… Mais c’est bien mardi dernier que l’annonce est tombée : Microsoft s’offre donc Activision Blizzard, un géant du milieu, pour la somme stratosphérique de 70 milliards de dollars. La compagnie profite donc de la rentrée dans ses rangs de licences hors normes avec Call of Duty et ses 17 productions proposées sur toutes les plateformes, accompagnée d’un bénéfice à l’année de 3,5 milliards de dollars.
Ce n’est pas la seule licence à rejoindre Microsoft puisque tous les jeux Blizzard comme Overwatch, World of Warcraft, Diablo et le studio Ring (qui possède Candy Crush sur mobile) prennent aussi part à ce rachat. Avec cette acquisition, Microsoft passe donc en tête de liste sur les FPS (jeux de tir à la première personne), les MMORPG (jeux massivement multi-joueurs) et mobiles avec Candy Rush qui compte 258 millions de joueurs par mois et dont les recettes s’élèvent à 1,8 milliard de dollars chaque année.
Cette manœuvre opérée par Microsoft n’est pas sans rappeler le coup d’éclat orchestré par Disney avec ses nombreux rachats de studios, notamment Pixar en 2006, Marvel Entertainement en 2009 et LucasFilm en 2012, ce qui avait couté 16 milliards de dollars au géant à grandes oreilles. Mais s’il y a bien un de ces rachats qui a marqué les esprits, c’est celui de la 21st Century Fox pour 71 milliards de dollars. Ces opérations offrent un monopole sur l’industrie avec de nouvelles licences et une meilleure disponibilité pour les services de streaming.
L’état d’Activision Blizzard et la suite
Cette transaction assez titanesque était peu attendue. En effet, aucune fuite n’avait été parvenue durant les deniers mois, mais elle n’en est pas pour autant surprenante. Le fait que cela soit opéré par Microsoft ainsi que la somme versée sont inédits mais la situation de Blizzard est assez difficile depuis quelques années, voire même catastrophique.
En premier lieu, il y a eu le rachat de King (Candy Crush) en 2015 qui était d’un montant important mais qui n’a pas réussi à contrecarrer les pertes astronomiques du studio, assistant à la désertion de ses jeux. Cette désertion s’explique par le fait que leur dernière production, Overwatch, date de 2016. Quant aux autres licences comme World of Warcraft ou encore Hearthstone, les joueurs sont présents à la sortie de nouveaux contenus (payants) et disparaissent quelques semaines plus tard, une fois avoir pris connaissance des ajouts. Sur ces trois dernières années, le studio a enregistré une perte de 11 millions de joueurs sur les différentes productions. En ce qui concerne la licence Call of Duty et pour la partie Activision de l’entreprise, cette dernière demeure toujours aussi plébiscitée mais peine à maintenir un niveau de joueurs constant face à d’autres FPS plus avant-gardistes ou mieux optimisés et équilibrés (c’est-à-dire des jeux équitables dans l’adversité des joueurs et jouables sur toute plateforme sans problème graphique).
Le coup de massue pour Blizzard a eu lieu l’été dernier avec la poursuite judicaire engagée par le DFEH (Departement of Fair Employment and Housing). Cet organisme luttant contre les discriminations a dénoncé des pratiques sexistes, notamment avec de la discrimination à l’emploi, une inégalité salariale et du harcèlement sexuel au sein des studios de Activision Blizzard. Ces pratiques ont conduit au suicide d’une salariée et a engendré une vague de protestations dans la communauté des joueurs et des streamers, produisant un boycott de certains jeux.
Dans l’optique de s’étendre pour proposer toujours plus de services et de contenus, Microsoft s’offre donc le luxe d’acheter un studio avec des atouts financiers importants et des licences vidéoludiques historiques. Ce rachat, espérons le, sera une opportunité pour redorer le blason de Activision Blizzard, qu’il soit de l’ordre du divertissement culturel ou même social.
Antoine Coffigniez
Sources : Le Monde, jeux video.com, Wikipedia, jeuxonline.info
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