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Prix On’ 2021 / Romans :

« Ce qu’il faut de nuit » de Laurent Petitmangin

Pour cette nouvelle édition du Prix littéraire On’, nos jurés se sont penchés sur six romans de la rentrée littéraire de septembre 2020. Toutes les deux semaines, découvrez ce qu’ils ont pensé des livres en compétition. Au programme cette semaine : Ce qu’il faut de nuit de Laurent Petitmangin, aux éditions La Manufacture de Livres.

Résumé : C’est l’histoire d’un père qui élève seul ses deux fils. Les années passent, et les enfants grandissent. Ils choisissent ce qui a de l’importance à leurs yeux, ceux qu’ils sont en train de devenir. Ils agissent comme des hommes. Et pourtant, ce ne sont encore que des gosses. C’est une histoire de famille et de convictions, de choix et de sentiments ébranlés, une plongée dans le cœur de trois hommes.

Aymée Nakasato : « Mon roman coup de cœur »

Ce qu’il faut de nuit est mon roman coup de cœur de l’année 2020. Un livre que je n’ai pas eu envie de fermer et qui me marquera encore longtemps. C’est l’histoire d’amour contrariée entre un père veuf et ses 2 fils, racontée par la voix du père mais qui laisse tout de même la place aux autres personnages et à leurs contradictions. Le titre, Ce qu’il faut de nuit, fait à la fois référence au clair-obscur de cette histoire d’amour paternel mais aussi à « un destin qui puisse s’opérer pour qu’on puisse se révéler », comme le déclare l’auteur lui-même.

Ce roman retrace la déception d’un père qui a toujours milité à gauche face à l’engagement de l’un ses fils, Fus, dans la jeunesse frontiste. Suite à un événement tragique qui fait que « la situation peut déraper, échapper aux personnages », le père va penser un instant son fils mort et c’est cette part de nuit qui a permis à ce père d’aimer de nouveau complètement son fils.

Au-delà de cette histoire d’amour, le roman s’inscrit dans un contexte social et politique. Tel que l’avait fait Nicolas Mathieu à travers Leurs enfants après eux, Prix Goncourt 2018, ce petit bijou littéraire est la preuve qu’un roman peut tout aussi bien dépeindre les conséquences de la désindustrialisation sur la classe ouvrière française qu’une analyse sociologique. Cette histoire d’amour familial complexe laisse tout de même place à une vie définie comme « belle », et ce jusqu’à la fin du récit, celle qu’on a choisie pendant la grande majorité de notre vie : « Je ne regrette rien de ma vie, en tout cas pas celle que nous avons vécue ensemble. Je pense que ça a été une belle vie. Les autres diront une vie de merde, une vie de drame et de douleur, moi je dis, une belle vie ». 

Ce coup de cœur est aussi partagé dans le monde de l’édition et auprès du grand public car après ce premier roman, Laurent Petitmangin compte désormais se consacrer pleinement à l’écriture à 56 ans, préférant la profession d’écrivain à celle d’ingénieur chez Air France.

Estelle Cocco : « Une belle surprise littéraire »

Ma lecture de Ce qu’il faut de nuit s’est avérée surprenante. Tout sauf séduite par la quatrième de couverture, les premières pages du roman et le style « rural » adopté par l’auteur, certainement pour coller au rang social des protagonistes, ont confirmé ma réticence. Puis, au fil des pages tournées, une belle surprise littéraire s’est dévoilée.

Dans une écriture simple et au service de l’intensité du récit, Laurent Petitmangin signe un roman sombre qui s’apparente au drame social et avec comme principal sujet les appartenances politiques et leurs dérives. L’auteur relate ainsi la détresse d’un père, incapable de comprendre et de raisonner son fils aîné et pour qui le silence deviendra la seule façon de supporter ce qu’il n’aurait jamais pu imaginer.

De non-dits en absence totale de dialogues, le lecteur assiste alors au lent mais inévitable déchirement d’une famille et à la perte d’un fils. La culpabilité et la honte du père d’avoir failli à sa tâche, l’optimisme du jeune frère sur qui repose l’équilibre familial et la fin tragique comme preuve des blessures indélébiles sont autant de bouleversements provoqués par la lecture de Ce qu’il faut de nuit, véritable concentré d’émotions qui rappelle alors l’équilibre fragile sur lequel repose toute existence.

Juliette Guérit : « D’une justesse touchante et terrible »

Laurent Petitmangin s’attaque à ce que nous avons de plus intime, de plus viscéral, de plus profond : l’amour que l’on porte à sa famille. Un lien qui unit les êtres quoi qu’il arrive. Un amour irrationnel. Ici, le père est partagé entre l’amour qu’il porte à son fils et son dégoût pour ce que ce dernier est devenu : un jeune d’extrême-droite, habité par une violence que son père ne comprend pas.

Ce qu’il faut de nuit est d’une justesse touchante et terrible. Comment continuer d’aimer quelqu’un qui est devenu tout ce que l’on rejette ? Le récit est porté par un style efficace qui rend l’histoire d’autant plus proche de nous, lecteurs.

Crédit photo bannière : Joël Saget / AFP

Aymée Nakasato, Estelle Cocco et Juliette Guérit

La rédaction

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