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Prix On’ 2021 / Bandes dessinées: « Un auteur de BD en trop » de Daniel Blancou

Pour cette nouvelle édition du Prix littéraire On’, nos jurés se sont penchés sur quatre bandes dessinées de l’année littéraire 2020. Toutes les deux semaines, découvrez ce qu’ils ont pensé des ouvrages en compétition. Au programme cette semaine: « Un auteur de BD en trop » de Daniel Blancou, aux éditions Sarbacane.

Daniel, auteur de BD fauché et sans grand talent, tombe par hasard sur Kévin, ado amorphe, auteur de quelques planches faites à la va-vite. Sauf que ces planches… sont tout simplement géniales! Ambitieuses, novatrices, magnifiques, intelligentes: le choc est dur pour Daniel, qui subit la comparaison. Daniel envoie alors le projet à son éditeur, se faisant passer pour l’auteur. Aussi enthousiaste que surpris, l’éditeur le signe illico et vise le festival d’Angoulême pour la sortie de l’album… À la clé: quitte ou double! Le succès si ça marche, la honte du plagiat si Daniel se fait prendre…

Nicolas Moreno : « Une bouffée d’air frais »

La foule qui emporte Édith Piaf dans un tourbillon de sensations où l’amour en ressort vainqueur n’est pas celle qu’on voit en couverture de cet auteur de BD en trop. Tous les corps sont épris dans une recherche, en plein festival littéraire, tandis que le protagoniste est relégué dans les coins: titre et auteur en marge, personnage seul à son stand, regardant sa feuille blanche. La volonté de bien faire, insuffisante pour les attendus de la société (ici, le monde de l’édition), transparaît déjà en première de couverture et préfigure ce qui nous attend au sein des bandes à venir, dessinées avec fraîcheur et plaisanteries métaphysiques. 

Daniel Blancou excelle dans l’oeuvre psychanalytique moderne: jeté dans le monde de l’édition, de la recherche de rentabilité et des rendez-vous immanquables comme Angoulême, le lecteur prend plaisir à voyager à travers les cases, naviguant entre la détresse de l’auteur et les excentricités de mise en page, renforcées par une coloration simple et efficace. Le mal-être de ce professionnel naît de la piqure à l’égo qu’il reçoit d’un écolier venant de dessiner le nouveau chef-d’oeuvre de la bande-dessinée et qu’il enverra à son éditeur en s’en attribuant la création. Les allers et retours entre mensonges et ambiances scolaires sont éblouissantes et jouent la carte du souvenir commun, dans ces salles d’arts plastiques, où sont venus à la vie les artistes en herbe du quotidien. 

La singularité de cette bande provient sans aucun doute de sa manière unique d’investir le réel, guidé par un scénario amusant et original: ces gens qui nous donnent à lire le meilleur de la BD chaque année sont présentés avec autant d’amour que d’angoisse, dans le seul but de proposer au lecteur un moment d’égarement, plus amoureux qu’angoissant. Quoi que…

Océane Caillat: « Une plongée comique et insolente dans le monde de l’édition »

Daniel Blancou capte premièrement votre regard par cette couverture colorée et peuplée. L’entrée dans l’ouvrage se veut pop et se fait ainsi prometteuse. Notre protagoniste, il s’appelle Daniel. C’est un auteur de BD documentaires qui ne connaît plus le succès. Ruiné et désabusé, il rêve de faire des BD « rigolotes ». Sa rencontre avec Kévin, un adolescent surdoué va finalement chambouler ses perspectives professionnelles. Les planches révolutionnaires de ce jeune prodige égaré se retrouvent pillées par l’auteur dépassé. Ce dernier s’engage alors avec un éditeur avec pour illusion d’enfin relancer sa carrière avec comme horizon: Angoulême.

L’intrigue une fois installée, les pages défilent et mon attachement à notre personnage en plein désarroi se fait grandissant. Il est pourtant lâche mais sa fragilité dans sa quête de reconnaissance est séduisante. Car cette souffrance de la page blanche est habilement amenée et surtout convaincante. Notre anti-héros a tout pour être détesté et pourtant il m’éveille uniquement de la pitié. De plus, avec cette bande dessinée, Daniel Blancou ose montrer les réalités de ce milieu professionnel. Précarité des auteurs, restrictions budgétaires des éditeurs, pression des prix littéraires, contrats impossibles… Bienvenue dans les coulisses de l’édition. Le tableau dressé de ce monde professionnel est cynique mais peut être essentiel aussi pour nous faire prendre conscience à nous lecteurs de ces réalités.

Finalement c’est un ouvrage qui fait preuve d’originalité et d’efficacité. Le scénario est audacieux et l’humour y est justement placé. J’y regrette peut-être quelques lenteurs qui m’ont empêché d’être entièrement transportée. Néanmoins je retiens que l’ouvrage m’a fait sourire mais aussi réfléchir. La promesse de divertissement est tenue, une découverte donc « rigolote » mais aussi instructive.

Nicolas Moreno, Océane Caillat

Crédits photos: Sarbacane

La rédaction

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