Robe de soie blanche de créateur, bandeau, cardigan, jupe. En quelques mots l’évolution de la tenue des joueuses de tennis. Et pourtant, il aura fallu des années pour que les joueuses passent de la robe de ville à une tenue plus confortable, colorée et courte. Rétrospective d’un siècle de tenue porteuse d’évolutions sociales et médiatiques dans le monde de la raquette.
Apparu dans les années 1870, le tennis n’avait dès lors pas encore choisi ses codes en matière vestimentaire. Il est coutumier de voir les pratiquants en habit de ville. Peu contraignant pour les hommes, beaucoup pour les femmes. En corset, manches longues, bas, jupe étroite et longue, chapeau, tout est fait pour la convenance, rien pour la performance. Les choses vont petit à petit évoluer. Et le style vestimentaire des joueuses se calque sur celui de leurs homologues masculins en jouant en chemise blanche. Une couleur qui devient la norme. La raison : aucune marque de transpiration, un comble pour l’élite. Une couleur qui aujourd’hui encore est exigée au Tournoi de Wimbledon, plus vieux tournoi de tennis.
Le début du court
La mode va ensuite s’immiscer dans le tennis. Les créateurs vont investir les courts. Les tenues vont devenir plus courtes et légères, le corset va disparaître. La performance commence à être prise en compte et les tenues commencent à être créées en conséquence. Symbole de ce renouveau, Suzanne Lenglen. La joueuse française va bousculer les codes en portant des tenues de créateurs taillées pour la performance. Ses tenues deviennent plus courtes dans des matières permettant une meilleure gestuelle. Autre symbole : Katharine Hepburn qui remplace sa jupe par un short, une première.
L’élégance ne quitte pourtant pas les courts. Dans les années 1950, les tenues deviennent de vraies pièces à porter, toutefois plus courtes que les décennies précédentes, mais toujours représentatives d’une appartenance élitiste. Le cardigan vient compléter l’élégance de la tenue. Le tennis garde au travers de sa garde robe un cadre fermé à une classe bourgeoise transcrit par ses apparats. Dans les années 1960, les robes courtes font leur apparition. La mode du tennis suit celle de la culture de l’époque. Légèreté et décolletés envahissent les courts. Il n’est plus rare de voir des jupes au-dessus du genou, des épaules dénudées, voire même des joueuses porter un short.
L’arrivée de la couleur
Une nouvelle tendance fait son apparition : la balle jaune. Question pratique pour les spectateurs, elle est le fer de lance d’une nouvelle évolution de la mode en tennis : la couleur. L’US Open sera le premier tournoi à accepter des tenues colorées. D’abord pastels, ces couleurs vont évoluer vers du flashy dans les années 80-90 et s’inscrivent parfaitement dans les tenues populaires de ces années. Les joueuses vont assortir leur tenue de la tête au pied, parfois uniformes, mais toujours colorées : c’est le total look. Les joueuses portent des jupes-shorts, plus pratiques, mais toujours gages de “féminité”. La visière complète la tenue et devient un élément indispensable. Puis, les tenues vont connaître un autre tournant : dos nus, dentelle, volant, décolletés.
Certes les tenues évoluent, mais elles changent plus vite que le règlement sportif de la Fédération française de tennis : “En principe, la tenue […] aux compétitions organisées par la FFT […] est la tenue blanche. Toutefois, pour certaines compétitions susceptibles de faire l’objet d’une retransmission télévisée, l’organisateur peut autoriser le port de vêtements de couleur”. L’article 7 du règlement a depuis été modifié. Une modification tardive car l’imposition du blanc reste légitime en 2012 et disparait dans celui publié en 2019.
Si la modification de la couleur des tenues prend effet, elle l’est également pour les sponsors. Alors qu’étaient interdits sur les vêtements et accessoires des “publicités ou noms de firmes écrits en toutes lettres”, il est désormais autorisé que le logo de l’équipementier y figure. L’enjeu médiatique est tel que l’influence sur les tenues est irrévocable. Aujourd’hui, quelle joueuse ne dispose pas de logo sur sa tenue ? Car les grands équipementiers se sont emparés de la tendance en sponsorisant les joueuses pour qui ils créent des tenues bien spéciales. Toutefois, le tennis est l’un des sports dans lequel aucune publicité n’apparaît sur les tenues. Seul l’équipementier est cousu sur la tunique.
Les tenues des tenniswomen ont ainsi traversé les générations, s’acclimatant aux tendances et aux évolutions sociales. L’émancipation vestimentaire des femmes s’aperçoit au travers de ces tenues. À coup de revers, les tenues véhiculent une image moderne d’un sport traditionnellement pratiqué par une majorité d’hommes. Depuis sa création à aujourd’hui, les femmes ont délaissé leur tenue de ville, encombrante et peu adaptée, pour une tenue qui leur permet d’atteindre les meilleurs résultats. Et faire voguer leurs performances sportives bien au-delà de la terre battue.
MILLET Stéphanie
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