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L’Europe d’Emmanuel Macron (1/5)

Next Leader of Europe Emmanuel Macron Time Magazine Cover
Une du Time du 07 novembre 2017 consacrée à E. Macron, « Le futur leader de l’Europe (si seulement il peut diriger la France) »

E. Macron a remporté l’élection présidentielle grâce à une rupture idéologique profonde sur le projet européen, récompensé par le prix Charlemagne. Malgré cette renaissance européenne, l’Europe est de nouveau à la croisée des chemins, entre déclin ou renaissance. De l’après « Grand Confinement » dépendra le IIème acte européen d’E. Macron.

Cette analyse constitue la première partie d’un ensemble de cinq articles.

Article #1 Réalité : E. Macron, l’européen 

« L’existence précède l’essence » disait Sartre. Le « futur leader de l’Europe » n’est pas né européen. En réalité, il n’était vraisemblablement pas un fervent européen. Le président de la République l’est devenu de par son évolution professionnelle et intellectuelle. 

Histoire et essence

Si l’on considère la biographie du chef de l’Etat, E. Macron est loin d’avoir connu la jeunesse et l’histoire d’un Gasperi ou d’un Schuman. Les pères fondateurs de l’Europe sont nés avec cette idée européenne en raison des guerres ayant déchiré le continent. L’existence s’est accompagnée de l’essence pour ces derniers. Le lancement de la CECA en 1951 veut rendre la guerre impossible entre les États membres, en mutualisant le contrôle de leur industrie. Dès son lancement, la construction européenne se pense à l’abri de la guerre. Jusqu’au début des années 2000, cette essence avant l’existence est présente chez la plupart des dirigeants. Aujourd’hui, plus aucun responsable européen n’a connu cette période du XXème siècle. Le moteur de la construction politique européenne, à savoir la construction de la paix, est tombé en désuétude du fait d’une paix longue à l’échelle de l’Histoire du continent. Il n’y a donc plus d’européens en faveur de l’approfondissement du projet politique. 

La nécessité d’éviter de retomber dans des anomalies géopolitiques a motivé cette construction jusqu’au déclin des Hommes témoins de cette Histoire. Elle a animé cette volonté d’unité comme en témoigne le discours du 17 janvier 1995 de François Mitterrand au Parlement européen. Ce discours affirme cette passation entre sa génération meurtrie et une nouvelle génération présente, celle des parlementaires européens. Il met en garde les générations futures de dirigeants européens contre le danger d’un retour au nationalisme et d’une nouvelle guerre sur le continent.

Ce discours résonne comme un acte empli de l’expérience de F. Mitterrand : « Il faut vaincre notre histoire. Si on ne la vainc pas, il faut savoir qu’une règle s’imposera : le nationalisme, c’est la guerre ! La guerre n’est pas seulement le passé, elle peut être notre avenir. C’est vous, mesdames et messieurs les députés, qui êtes désormais les gardiens de notre paix, de notre sécurité et de notre avenir ». Mais ces gardiens de la paix, du fait de cette paix victorieuse, ont hélas oublié cette perspective guerrière ayant été le moteur du projet politique européen. Ils ont fini par la considérer comme un outil économique. Alors, quelles sont aujourd’hui les motivations des chefs d’État ? Sont-elles fondées sur un plus grand projet politique européen ? Leurs convictions acquises se tournent-elles vers une union politique ou une nécessité économique ? 

Opportunisme 

A toutes ces questions, il y a un nom comme réponse : Emmanuel Macron. Il n’est pas né européen mais l’est devenu, en 2005, à 28 ans. Pour quelle raison peut-on affirmer ce propos ? Tout d’abord car les hantises de la guerre dans l’Union Européenne, voire sa construction, ont pu lui paraître lointaine. Dans son livre Révolution, la description de sa jeunesse est bourgeoise et très franchouillarde. On est loin d’une vie tournée vers le monde, vers l’international, à l’image d’autre responsables politiques comme par exemple le premier ministre D. De Villepin. E. Macron lui-même dit que « C’était une vie immobile, dans une ville de la province française » avant une transhumance vers Paris à 16 ans. 

Puis, son premier vote lors d’une présidentielle a été en 2002 pour J. P. Chevènement, ancien ministre de gauche souverainiste contre le traité de Maastricht et contre le traité de Rome, via le Mouvement des citoyens (MDC). Par déduction, nous pouvons penser qu’Emmanuel Macron aurait voté « non » en 2005. Mais de son passage au MDC, il garde un élément important de son projet européen : l’antifédéralisme. Lui-même l’explique textuellement dans son livre programmatique Révolution « Trop nombreux sont ceux qui ont renoncé à l’idée même d’une position propre, originale utile de la France. Parce qu’ils la jugent déclassée, incapable de se redresser, ou condamnée à se dissoudre dans l’UE ». De quand dater l’essence européenne d’E. Macron ? De la Commission Attali ? De son passage dans le privé ? De son travail de secrétaire général à l’Elysée ? De son ministère ?  

Après son passage à l’Elysée en tant que secrétaire général adjoint, il est devenu un spécialiste de la question économique européenne se faisant agréger par la prestigieuse London School of Economics. Suite à sa nomination comme ministre de l’Economie en 2014, E. Macron va faire de Bercy une rampe de lancement pour son mouvement En Marche ! et pour sa candidature à la présidentielle. 

C’est à ce moment précis qu’Emmanuel Macron a fini sa mue d’européen convaincu par évolution intellectuelle, opportunisme peut-être, et sans doute par stratégie pour la présidentielle en vue de s’opposer à Marine Le Pen. En s’imposant comme le candidat pro-européen, E. Macron a pu gagner l’élection présidentielle avec un saupoudrage populiste et antisystème.  Malgré ces ambiguïtés, il a relancé le projet européen. La réalité est donc que l’Union Européenne n’a plus d’idées politiques du fait de la panne de son moteur qui est l’absence de paix. Il n’y a plus de générations ayant connu la guerre au pouvoir en Europe. Pourtant, Emmanuel Macron a émergé avec un projet européen faisant désormais ressouffler l’espérance d’un projet politique plus complet se basant sur un mot : souveraineté.

Adrien-Guillaume Padovan

La rédaction

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