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Gilets jaunes #3 : de simples revendications économiques ?

« Voter, c’est décider de qui va décider pour toi ». En 2015, à la sortie de l’album Feu, le rappeur Ken Samaras a, à priori, formulé les revendications démocratiques du mouvement social des Gilets jaunes. Bien que la baisse drastique du pouvoir d’achat et la dénonciation du système d’imposition sur les carburants soient initialement au coeur […]

« Voter, c’est décider de qui va décider pour toi ».

En 2015, à la sortie de l’album Feu, le rappeur Ken Samaras a, à priori, formulé les revendications démocratiques du mouvement social des Gilets jaunes.

Bien que la baisse drastique du pouvoir d’achat et la dénonciation du système d’imposition sur les carburants soient initialement au coeur des protestations des Gilets jaunes, la critique de notre démocratie actuelle est perceptible à l’heure de l’Acte 10. En effet, selon eux, le régime se doit d’être plus direct, horizontal. Moins représentatif, insoumis à la lignée hiérarchique d’un gouvernement élitiste et intellectualisé, qui ne cesse d’être accusé de son détachement envers les revendications populaires. 

La dénonciation d’une « République d’énarques »

Mais alors, pourquoi « Emmanuel Macron est le président des riches » est-elle l’une des phrases les plus présentes dans le ressentiment français depuis 2017 ? Pourquoi le « macronisme », ayant bousculé l’échiquier politique traditionnel et ayant fondé l’espoir d’une classe politique plus morale, est-il aujourd’hui perçu comme le foyer d’une élite méprisante, constituée d’experts aux antipodes de la parole citoyenne ?  C’est ainsi que s’est formée la division au sein de la nation française : d’un côté, les citoyens oubliés appartenant à la « France périphérique » et de l’autre les prétendus « premiers de cordée » intégrés dans la « start-up nation », face à face, dans l’impossibilité de dialoguer de par le trop important fossé qui les sépare. Deux visions s’opposent alors, l’une faisant confiance au pouvoir de la classe politique et à sa capacité de Raison, l’autre souhaitant recourir à la parole du peuple, servant l’expression de la volonté générale. 

Le souhait d’une démocratie participative 

C’est ainsi qu’est née la demande de démocratie participative, notamment à travers l’instauration du Référendum d’initiative citoyenne et le Grand Débat National. Au détriment d’une démocratie formelle, les Gilets jaunes s’accordent à penser que le peuple a besoin d’une démocratie « réelle ».

L’idée ? Conférer davantage de droits aux citoyens. Comme le pouvoir de voter directement les lois, de révoquer les élus à tout moment et à tous les niveaux. Mais aussi d’établir des référendums sur l’ensemble des problématiques sociales, ou encore de décider du salaire médian des représentants politiques.

Provenant majoritairement du sentiment de méfiance envers nos institutions politiques et du rejet partiel ou assumé d’un régime coupé des réalités, le peuple français souhaite se détacher du contrat social de Rousseau. À leurs yeux, rien n’a plus d’importance que l’expression de la volonté générale. Et c’est ce à quoi devra ressembler l’essence même de la démocratie de demain. 

Vers un ultra-démocratisme ? 

Les revendications démocratiques de ce mouvement doivent cependant être appréhendées avec recul et parcimonie afin d’éviter l’avènement de ce que l’on appelle la « démocratie illibérale ». Henri Weber, ancien sénateur et député européen, associé à la Fondation Jean-Jaurès met en garde contre ce qu’il appelle l’ultra-démocratisme. Cela consisterait à détruire la démocratie par excès. Offrir une pluralité excessive de droits aux citoyens jusqu’à en empêcher l’exercice du pouvoir politique. C’est donc envisager la création d’un système anarchiste impotent et inefficace sur le long terme.

En réponse à cela, on voit paradoxalement apparaître une démobilisation populaire et une montée en flèche de l’autoritarisme dans une société où la majorité des citoyens réclame un retour à l’ordre. Ainsi, vouloir remplacer la démocratie représentative sans envisager un compromis modéré, c’est indirectement rechercher à déconstruire la démocratie. Selon H. Weber, il est important de ne pas se tromper de diagnostic : c’est la réforme en profondeur des institutions démocratiques et leur efficacité qu’il faut envisager en priorité.

Source Photo : L’Express

Victoire Radenne

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