Ce Jeudi 22 mars, un mouvement insurrectionnel a éclaté dans de nombreuses Facultés de France. À Clignancourt, site universitaire de Sorbonne Université, un blocus a été mis en place dès 8 heure du matin jusqu’en début d’après-midi. Nous avons interrogé plusieurs étudiants sur place.
Il y a 50 ans, l’insurrection naissait dans la Faculté de Nanterre pour devenir le point de départ du mouvement social de mai 1968. Ce jeudi 22 mars, c’est un nouveau mouvement qui saisissait les facultés de Sorbonne Université. La Bibliothèque Interuniversitaire de la Sorbonne avait fermé ses portes et dès 8 h du matin, le site de Clignancourt était occupé par des centaines d’étudiants. 200 ont été recensés entre 8 et 9 h. Le site de Tolbiac fut également fermé pour la journée. À 10 h une assemblée générale s’est tenue à la Sorbonne pour coordonner les étudiants avant de partir manifester à 13 h.
Un Blocus « Bon Enfant »
Bien loin des casses boulevard Voltaire et des manifs à Nation, une collation était offerte aux étudiants dans l’attente d’une seconde assemblée générale sur les sites de Clignancourt. L’assemblée s’est tenue à 10 h, où il y fut communiqué les informations de dernières minutes telles que la « prise » de Panthéon par les manifestants. Ils y votèrent aussi la reconduction de blocage de Clignancourt à une date ultérieure. Le cortège de Paris IV prévoyait de se rejoindre à Dugommier d’où ils iraient manifester. Toujours à Clignancourt, se sont tenus des ateliers-débats dans une ambiance que les participants qualifieraient de « bon enfant », « festive et joyeuse ». Aucun matériel n’a été dégradé. Seules les chaises et tables ont été déplacées pour bloquer les issues.
« Les étudiants étaient vraiment présents. C’est la première fois que j’en vois autant. »
« Le Problème d’une Sélection »
À la question « Pourquoi est-ce important de lutter contre la sélection à la fac ? » voici ce que certains étudiants ont répondu :
« Le problème d’une sélection c’est qu’elle se fait sur certains critères, or ces critères dépendent tellement du cadre familial que ça sera forcément une reproduction des inégalités. Le lycée d’où on vient par exemple aura un impact sur la sélection. »
« Il faut faire bouger les choses, mais pas de cette manière. Cette sélection créée des disparités entre les gens. Le savoir c’est la base, c’est la transmission. Comment faire de la transmission si on est élitiste ? C’était dans l’ancien régime que les élites avaient la main sur la connaissance. Maintenant ça ne sert à rien de régresser. »
« Pour moi c’est une évidence, tout le monde doit avoir sa chance et ça couperait énormément de possibilités d’accès à l’enseignement supérieur alors que c’est un bien public. »
Lorsqu’il s’agit de la sélection, les étudiants pointent clairement le doigt en direction de Parcoursup et plus particulièrement envers la lettre de motivation. Pour certains, c’est un des critères les plus discriminants :
« La lettre de motivation qu’il faut mettre sur parcoursup a déclenché l’avènement d’organismes privés qu’il faut payer pour qu’ils aident les élèves à faire de bonnes lettres de motivations. C’est discriminant car ce qu’on observe dans une lettre de motivation c’est l’aisance à l’orale, le vocabulaire, ce genre de choses qu’une personne provenant de classes populaires n’acquerra qu’à la Fac avec le temps. Or on ne lui laisse pas l’occasion de le faire. C’est trop tôt pour ce genre de choses. »
Quel Impact Pour Cette Manifestation
Les avis diffèrent, certains optent pour l’optimiste, d’autres se montrent moins enthousiastes.
« Honnêtement je pense que ne ça va rien changer mais je vais le faire jusqu’au bout. »
« Peut-être que les résultats ne vont pas être hyper probants dès maintenant mais si on laisse les choses commencer… »
« C’est une grosse action et déjà que pleins de petites actions peuvent faire avancer les choses alors une grosse action, on espère quand même qu’elle aura un réel impact. Après c’est pas la première question qu’on se pose en allant aux manifs, il y a aussi une quête personnelle. Agir pour la majorité mais aussi pour toi. »
Cette manifestation s’est déroulé le même jour que les cheminots. Est-ce que l’ampleur du mouvement en sera impactée ? Deux étudiantes nous ont répondues amusées :
« Non, c’est pas Germinal non plus. Au niveau des étudiants on est nombreux et diversifiés. Après il y a des Facs qui se mobilisent moins que d’autres. À Paris 3 il y a beaucoup moins d’étudiants qui se mobilisent qu’à Paris 7 mais il y en a quand même. »
« Là, c’était une grève générale donc peut-être que ça passera un petit peu à la trappe. En tout cas, là il y a eu une convergence des causes et franchement les étudiants étaient vraiment présents. C’est la première fois que j’en vois autant. »
Depuis ce jeudi 22, les mouvements étudiants n’ont pas faibli, notamment sur les sites de Panthéon-Sorbonne. À Clignancourt, de nouvelles mobilisations pourraient être attendues dans la semaine. Une chose est sûre, les étudiants mobilisés lors de ce blocus semblent déterminés à aller « jusqu’au bout ».
Crédit photo : Marie Morlho
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