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Trumpcare rime avec Nocare

Le 23 mars dernier, la loi pour la protection des patients et les soins abordables (Patient Protection and Affordable Care Act), plus connu sous le surnom d’Obamacare, célébrait ses sept ans de promulgation en tant que couverture sociale de santé obligatoire et quasi universelle aux États-Unis. Au même moment, l’administration Trump, fraîchement arrivée à la […]

Le 23 mars dernier, la loi pour la protection des patients et les soins abordables (Patient Protection and Affordable Care Act), plus connu sous le surnom d’Obamacare, célébrait ses sept ans de promulgation en tant que couverture sociale de santé obligatoire et quasi universelle aux États-Unis. Au même moment, l’administration Trump, fraîchement arrivée à la Maison-Blanche, œuvre avec la majorité législative républicaine pour l’abroger, en vain.

Le projet de loi American Healthcare Act of 2017- H.R.1628, porté par le président de la Chambre des représentants, Paul Ryan, n’a pas fait long feu au Capitole. Programmé dans l’agenda législatif pour être débattu et voté à la suite de l’étude en comité, le projet de loi a été retiré le 24 mars in extremis principalement par manque de soutien du parti républicain, qui détient pourtant une majorité de plus de 240 représentants.

En termes de politique publique, c’est une défaite complète pour cette nouvelle administration. Le candidat Trump, vantant ses qualités infaillibles de négociateur commercial, n’avait cessé de répéter que l’Obamacare représentait un désastre de politique publique devant faire l’objet d’une abrogation rapide et éventuellement d’un remplacement – comment oublier son allitération préférée « repeal and replace » ? Pris d’un élan de rupture symbolique, le président Trump s’est ensuite empressé de signer un décret visant à minimiser les coûts de la loi Obamacare dès le premier jour de son mandat.
L’échec du projet de loi actuel, déjà surnommé Trumpcare, prend une tournure d’autant plus amère pour l’administration Trump que ce début de mandat est marqué par les controverses telles que la suspension des décrets migratoires, le départ du conseiller à la sécurité nationale à la suite de révélations sur ses conversations avec l’ambassadeur russe, ou encore les accusations appuyées de surveillance électronique du président Trump à l’encontre du président Obama.

Il s’agit également d’un réel naufrage législatif pour le parti républicain. Depuis sa promulgation, l’Obamacare est devenue une pierre angulaire des tensions bipartites de la classe politique américaine. Décriée comme apparentée aux idées de l’État providence, très éloignées du modèle socio-économique américain, les législateurs républicains ont tenté d’abroger la loi dans son intégralité dans le cadre de la décision de la Cour suprême qui a validé la constitutionnalité du texte, et cinq fois lors du vote du budget fédéral annuel, entraînant notamment le blocage total du gouvernement fédérale (un « shutdown ») pendant l’automne 2013.

Au-delà du texte de la loi, l’Obamacare consiste en une infrastructure de santé publique historique implantée dans la multiplicité des modes de vie américains, même si, de par ses dysfonctionnements, cette loi ne fait pas l’unanimité.  Grâce à une régulation des coûts de la couverture santé au niveau national et par État, cette loi vise à rendre la couverture santé abordable pour tous les Américains, et tout particulièrement les groupes de population les plus vulnérables, c’est-à-dire les personnes âgées, les familles aux revenus les plus faibles et les familles qui résident là où les marchés des assurances santé sont les plus coûteuses. En revanche, Trumpcare propose un système de couverture de santé non obligatoire où les assureurs, grâce à une relaxation des régulations, récupèrent partiellement le monopole des primes d’assurance, sur les contrats des personnes âgées par exemple. Là où l’Obamacare impose l’harmonisation des prix des primes d’assurance en prenant en compte des critères de vie essentiels tels que l’âge, le sexe, le revenu ou la situation géographique, Trumpcare n’en tient pas compte, libérant ainsi considérablement les compagnies d’assurances de la régulation des prix des primes, et donc incitant à des augmentations majeures des prix des primes d’assurance.

Finalement aux manettes exécutives, avec le contrôle des deux Chambres du Congrès et après sept ans de frustrations législatives, le parti républicain a manqué une opportunité en or de tourner la page de l’Obamacare. Alors que Paul Ryan a publiquement admis l’annulation du projet de loi American Healthcare Act of 2017- H.R.1628 par manque de soutien politique à la Chambre des représentants, Trump a préféré prendre ses distances avec le projet législatif avorté, rejetant d’abord la faute sur l’opposition démocrate puis implicitement sur Paul Ryan, en minimisant le manque de soutien notable de son propre parti après seulement trois semaines de négociation tout en prédisant d’un ton menaçant qu’Obamacare allait « exploser ». Pour le moment, c’est Trumpcare qui vient d’imploser.

Amal Amaskane

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