« Les femmes sont l’avenir du sport ». C’est sur ces mots que Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, ouvre son discours alors qu’il inaugure la première promotion des Égéries du sport féminin le 14 mars dernier. Une occasion pour Sorb’on de revenir sur les réalités de la pratique du sport par les femmes et de parler féminisme avec Allison Pineau, demi-centre de l’équipe de France de handball.
Après un rapide discours du ministre qui déplore les inégalités entre les femmes et les hommes dans le monde du sport, professionnels et témoins du sport féminin font table ronde et débattent des enjeux du développement du sport féminin. Gouvernance, clubs, fédérations, marché commercial, gradins, terrain ou encore médias, les intervenants nous montrent les réalités de la sous-représentation féminine et ce qu’il y a à faire pour encourager le sport féminin. Après cette première partie de débat de deux heures, les égéries du sport féminin arrivent sur scène. Parmi elles, des figures bien connues du sport : Sébastien Chabal, Raymond Domenech, Allison Pineau, ou Richard Dacoury l’ex-basketteur mais aussi Thierry Marx, Michel Cymès et Delphine Ernotte la PDG de France Télévisions notamment. Leur rôle en tant qu’égérie : donner un coup de projecteur à des clubs féminins par leur notoriété.
La réalité du sport féminin
En 2014, 37% des licenciés tous sports confondus sont des femmes. Selon les intervenants entendus, les femmes pratiquent le sport avec pour principaux moteurs le bien-être, la santé, la détente et l’apparence physique. Elles pratiquent le plus souvent des sports en autonomie ou hors cadre comme le yoga, la randonnée ou la course. Nous allons trouver dans une pratique occasionnelle ou régulière autant d’hommes que de femmes. Cependant, lorsque le sport devient intensif, nous assistons au retrait des femmes. La compétition sportive les attire moins. Par ailleurs, comme dans d’autres professions, les sportives sont moins payées que les sportifs. Didier Poulmaire, avocat de Laure Manaudou lorsqu’elle était sportive de haut niveau souligne que, malgré son titre de championne olympique comme son frère, Florent Manaudou, le salaire de Laure était bien inférieur. De plus, on les retrouve souvent à une même place médiatique : elles sont les ambassadrices naturelles des marques commerciales de santé et de bien-être. Néanmoins, un progrès est visible à l’écran : 20% des retransmissions sportives se consacrent au sport féminin contre 7% en 2007.
« Sport féminin » : une discrimination positive ?
Malgré toutes ces belles paroles sur le sport féminin et l’espoir que les intervenants ont pu porter, quelques mots échappent à la bienséance moderne. Pour les désigner, on a pu les appeler « les nanas » ou encore, Patrick Veteau, président du Lille métropole RC Villeneuvois alors qu’il vantait le mérite de ces femmes qui ne pratiquent pas un sport de « mauviette », précise comme pour convaincre de la légitimité de son équipe féminine : « et en plus elles sont jolies ». Cela nous permet de revenir sur le terme central de l’événement organisé par le ministère : « le sport féminin ». Ce terme accentue le fait qu’il y a une spécificité du sport pour femmes. Le sport féminin a en effet une existence indépendante du sport en lui-même et a même droit à une page Wikipédia alors que la page « sport masculin » n’existe pas.
Interview d’Allison Pineau, demi-centre de l’équipe de France de handball
Allison Pineau, meilleure joueuse du monde en 2009 préparant actuellement l’Euro 2018 est l’une des dix-sept personnalités choisies pour parrainer une association sportive promouvant le sport féminin. Elle est la seule à avoir relevé l’impertinence du terme « sport féminin » et déclare : « j’espère qu’un jour on ne parlera plus de sport féminin mais de sport tout court ». Sorb’on est allé à sa rencontre pour approfondir le sujet avec elle.
On vous désigne « égérie du sport féminin », qu’est-ce que cela vous procure ?
Allison Pineau : Je suis ravie de faire partie de ce projet, c’est bien qu’on parle des femmes en général parce que c’est vrai qu’on le fait à travers le sport mais ça concerne notre société. On le fait par le sport pour mobiliser les autres qui sont à côté de nous. Représenter ma discipline, le handball, c’est super, mais faire partie de la première promo de ce projet, c’est génial.
Que pensez vous du terme « sport féminin » ?
A. P. : Quand on parle de sport féminin, le fait de rajouter « féminin » derrière, on sous-entend que le sport est dédié aux hommes et pas aux femmes, donc c’est une discrimination positive de le dire.
Comment peut-on changer les choses selon vous ?
A. P. : Il y a des vecteurs qui font que les choses peuvent être amenées à changer en faisant des manifestations comme ça, et en ayant des marraines qui relaient et qui poussent des projets pour qu’on parle à des femmes dans le sport.
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